Les risques liés aux relations humaines au travail
Facteurs organisationnels et psychosociaux de perturbation
Les facteurs organisationnels et psychosociaux de perturbation sont les facteurs qui réduisent la satisfaction et la motivation au travail. Le manque de satisfaction et de motivation au travail a des répercussions néfastes non seulement sur le plan économique (par la baisse de productivité ou de qualité du travail), mais aussi sur la santé des travailleurs.
Les facteurs psychosociaux en tant que risques d’atteinte à la santé psychique ont longtemps été négligés par la recherche traditionnelle dans le domaine de la santé au travail. La problématique à laquelle on touche lorsqu’on s’attaque aux risques psychosociaux est complexe surtout parce que les facteurs de risques se trouvent à tous les niveaux de l’organisation (stratégique, organisationnel, personnel et technique) et dans les différentes sphères de vie de l’individu (sociale, familiale et professionnelle).
Nous listons ci-dessous une série d’éléments de l’organisation du travail pouvant devenir des facteurs de perturbation. Cette liste ne prétend pas être exhaustive.
Ces éléments constituent des facteurs de perturbation d’autant plus graves si plusieurs d’entre eux sont présents pour une même personne. Nous soulignons aussi que seuls les facteurs professionnels sont pris en compte ici, et que les facteurs de la sphère privée des individus ne sont pas traités. Il ne s’agit pas de minimiser leur importance, mais bien de rester dans le spectre d’action des acteurs internes à l’entreprise (ou organisation) intervenant dans le domaine de la sécurité et de la protection de la santé au travail.
Caractéristiques du travail
Rythme et quantité de travail
Le rythme de production ou la quantité de travail imposé doit être adapté aux capacités des collaborateurs. Le rythme trop rapide ou la quantité ingérable par la personne sont les prémisses du stress. Celui-ci aura des conséquences néfastes sur la santé si la personne n’a pas de temps de récupération suffisant. Le rythme trop lent ou le manque de travail est aussi, dans une autre mesure, un facteur de stress ou du moins de démotivation.
Charge émotionnelle
La charge émotionnelle est inhérente à de nombreuses professions, notamment celles où la perception des émotions des autres et la maîtrise des siennes sont essentielles pour mener à bien le travail. Cette charge peut perturber l’équilibre émotionnel de l’individu et se répercuter dans sa sphère privée. C’est souvent le cas dans les professions sociales ou de soins.
6 Basé sur le travail de Marc van Veldhoven cité par Hugo D’Hertefelt, in Le stress au travail, « La mesure de la charge psychosociale sur le lieu de travail », Newsletter BTS, n°19-20, septembre 2002.
Charge mentale
La charge mentale que provoque une activité est déterminée par l’adéquation entre les exigences de traitement de l’information pour accomplir la tâche et la capacité de la personne à traiter l’information. Lorsque la quantité d’information à traiter pour une tâche dépasse les capacités de traitement de l’information de la personne chargée de l’exécuter, la charge mentale est source de stress. Jouir d’une grande autonomie peut devenir une charge supplémentaire.
Charge physique
La charge physique que provoquent les déplacements et levages de charges, selon le poids en question et la fréquence de l’activité, peut provoquer des problèmes de santé de toute nature. Les plus importants sont les troubles musculo-squelettiques. Il ne faut toutefois pas oublier que le fait de ne pas pratiquer une activité physique, d’exposer sa personne à des mauvais traitements ou de ne pas prendre soin de soi-même, péjore de manière globale la qualité de vie.
Le commentaire de l’article 25, OLT3, recommande des limitations de charges physiques et des mesures d’organisation et de formation en la matière
Variation diversité dans le travail
La monotonie dans le travail est une source de stress, car elle est liée à un manque de valorisation du travailleur. Varier ses tâches peut être un moyen de réduire le stress.
Possibilités d'apprentissage
La possibilité de se perfectionner et d’évoluer est une source de motivation importante. Lorsque le travail d’une personne n’offre pas la possibilité d’apprendre de nouvelles choses et que les connaissances de cette personne stagnent , son bien-être en sera affecté. Comme pour la diversité des tâches, un travail n’offrant que peu de possibilités d’apprentissage sera moins gratifiant qu’un travail stimulant, permettant de se réaliser.
Autonomie
Autonomie dans le travail
L’autonomie est souvent liée aux responsabilités du travailleur. Le manque d’autonomie peut susciter un sentiment d’aliénation par rapport au travail, un manque de confiance en soi, par exemple. Toutefois trop d’autonomie est aussi cause de stress (exemple : contrôleurs aériens).
Participation
Faire participer les collaborateurs aux décisions favorise leur adhésion. Ils s’approprient les décisions et ne les ressentent pas comme une fatalité sur laquelle ils n’ont aucune prise. Il faut faire attention à ce que les demandes et propositions des collaborateurs soient prises en considération, et que ces derniers soient suffisamment informés des raisons des choix finaux.
Ceci afin de ne pas créer chez le collaborateur un sentiment de déception qui parasitera les relations à venir.
Relation et communication
Relations avec les collègues
Le soutien entre collègues et l’ambiance au travail sont deux facteurs de satisfaction souvent relevés par les travailleurs. En particulier, lorsque la tâche à accomplir est émotionnellement lourde, la solidarité et l’échange d’expériences sont d’une grande aide pour prendre de la distance afin d’éviter d’être « mangé » par le travail. La rotation du personnel et les absences sont des indicateurs de la qualité de l’ambiance de travail. Favoriser les relations informelles (par la création d’une cafétéria, par exemple) peut l’améliorer considérablement.
Management
Selon la capacité de la hiérarchie à motiver son personnel ainsi qu’à assurer un environnement de travail positif et constructif, les collaborateurs seront plus ou moins satisfaits et s’impliqueront plus ou moins dans leur travail. Le fait de se savoir écouté, compris et respecté est un facteur de satisfaction tant dans la sphère privée que professionnelle. Inversement, le fait de se sentir incompris et de subir les décisions est un facteur de stress. D’autant plus lorsque les personnes qui n’écoutent pas sont des supérieurs hiérarchiques ou d’autres personnes ayant un pouvoir d’influence ou de décision sur des collaborateurs.
Le type de management peut aussi être un facteur de stress, lorsque la vision, les objectifs ne sont pas clairs ou qu’il n’est pas adapté à l’activité de l’entreprise (ou de l’organisation).
Relations avec le/la chef/fe direct/e
La qualité de cette relation dépend en grande partie de la qualité de la communication. Comme pour le management dans son ensemble, la communication ne doit pas être unilatérale pour qu’une prise en considération des besoins soit possible.
Communication
Comme nous l’avons vu aux points précédents la communication est particulièrement importante pour garantir la compréhension et le respect des décisions. Elle permet aussi d’obtenir les commentaires et les propositions des travailleurs.
Problèmes liés au travail
Manque de précision dans le travail
Des tâches mal définies ou des objectifs peu précis constituent des facteurs de stress car l’individu se trouve dans une situation où il n’est jamais sûr d’accomplir le travail qu’on attend de lui. Les cadres (ou responsables hiérarchiques) sont aussi exposés à ce facteur de stress lorsque les objectifs sont définis en terme subjectifs ou vagues.
Le flou dans la définition des rôles est aussi un facteur de stress important. Les responsabilités mal définies laissent libre cours à l’interprétation de chacun. Certaines tâches peuvent ne pas être accomplies ou sont accomplies à double. Ces zones troubles, où l’on ne sait pas qui est responsable de quoi, sont des terrains fertiles pour les prises de pouvoir spontanées et les conflits.
Changements dans les tâches
La grande variation des tâches peut donner à l’individu l’impression de se disperser, de ne pas accomplir un travail complet qui fait sens. Lorsque les changements lui sont imposés et que les raisons ne lui sont pas clairement expliquées, le mal-être peut s’exprimer par un rejet du changement ou par le désintérêt de l’individu pour son travail.
Information
L’accès à l’information est une source de valorisation des personnes. Les informations secrètes et les décisions opaques favorisent les rumeurs, la méfiance et le scepticisme des collaborateurs.
Conditions de travail
Rémunération
Tous les besoins de base (physiologiques) dépendent, dans la plupart des cas, du salaire. La personne qui perçoit que sa rémunération est adéquate et répond à ses besoins, sera satisfaite de son travail et aura une attitude positive.
L’iniquité salariale est, quant à elle, source d’insatisfaction. Le gain matériel est un signe de gratification et de reconnaissance. Celui qui perçoit plus de reconnaissance pour ses collègues que pour lui-même se sentira injustement traité. Ce sentiment d’injustice est néfaste pour l’équilibre mental de la personne. Les différences de traitement étant le reflet de jugements de
Valeurs ou de préjugés infondés, se sont en particulier les groupes sociaux minoritaires ainsi que les femmes qui en sont le plus souvent victimes. Il arrive souvent, dans les administrations et les milieux académiques qui en font partie, que des employés faisant un travail équivalent soient traités différemment pour des raisons historiques ou d’organisation rigide.
Nous rappelons ici que la rémunération est un facteur d’insatisfaction important lorsqu’elle est perçue comme étant insuffisante, mais qu’elle n’est pas un facteur de satisfaction efficace à long terme pour motiver les collaborateurs.
Possibilités de carrière
La possibilité pour une personne d’évoluer et répondre à ses aspirations personnelles est un facteur de satisfaction. Celui-ci devient plus important et se rapproche du besoin physiologique lorsque, comme c’est le cas à notre époque, le marché du travail est saturé et que les grandes entreprises ne pensent qu’à réduire les effectifs. Gérer les carrières et les planifier est bénéfique à la fois pour le collaborateur (qui voit une cohérence dans sa carrière et se sent valorisé), et pour l’entreprise qui pourra développer les qualifications de ses collaborateurs et en bénéficier.
Incertitude quant à l'avenir
La précarité de l’emploi est un facteur de stress important puisqu’il constitue une épée de Damoclès menaçant les besoins de base de la personne. Les contrats temporaires et les menaces de réduction des effectifs amènent des peurs latentes et des conflits. En effet, dans ce genre de situation une concurrence s’installe et la méfiance peut apparaître dans des relations de collaboration.
L’incertitude peut aussi venir du flou des rôles et des responsabilités.
Satisfaction
Plaisir au travail
Un travail intéressant et qui fait sens participera largement à la satisfaction au travail de la personne. Le travail est source de plaisir lorsque la personne sait qu’elle est utile, qu’il est possible de relever les défis et qu’elle a les moyens de bien faire son travail.
Implication dans l'organisation
Le manque de reconnaissance des collaborateurs ne favorisera pas leur implication dans leur travail. Il ne s’agit pas seulement de dire merci et de souligner l’importance du travail accompli, mais aussi de faire participer les collaborateurs dans les décisions qui les concernent. De plus, cela réduit la résistance au changement.
Possibilité de changer d'emploi
Dans le même sens que l’incertitude quant à l’avenir et les possibilités de carrière, le fait pour une personne de se sentir « prisonnière » de son travail est un facteur de stress. La possibilité de changer d’emploi à elle seule est rassurante. Il n’est pas nécessaire d’opérer le changement pour bénéficier de cet effet.
Les professions très spécialisées sont plus exposées au stress, car ces professionnels/les ont l’impression de ne rien savoir/pouvoir faire en dehors de leur spécialisation. C’est le cas, par exemple, de nombreux enseignants.
Contrainte
Besoin de récupération
La récupération est primordiale pour la gestion du stress. En effet, des périodes de stress rapprochées ne permettent pas à l’individu de récupérer, de « décompresser », et cela peut le mener à l’épuisement professionnel (ou burn-out). Alterner les activités potentiellement stressantes avec des activités qui le sont moins est une manière de réduire les effets nocifs du stress.
Inquiétude
Le marché du travail et les responsabilités familiales sont des sources d’inquiétude qui sont une pression de plus sur l’individu.
Qualité du sommeil
Le sommeil est une forme de récupération vitale pour l’être humain. Si le sommeil est de mauvaise qualité la personne sera plus vulnérable au stress. Le stress prolongé maintien la personne dans un cercle vicieux, puisqu’une personne stressée ou souffrant de dépression a un sommeil troublé, de mauvaise qualité.
Réactions émotionnelles au travail
Le travail n’est pas une zone libre d’émotions. Bien au contraire, le travail lui-même peut être particulièrement impliquant émotionnellement. C’est le cas, par exemple, du travail social ou des soins, notamment avec des enfants. Lorsqu’une personne « craque » et que ce n’est pas la première à le faire, le climat de travail en souffrira. Ce type de réaction est un indicateur d’un mal-être au travail.
Fatigue au travail
La fatigue générale peut être due à différents facteurs privés ou professionnels. Elle rend la personne plus vulnérable, car elle n’aura pas la force de « se défendre », de défendre ses intérêts. Le temps de récupération peut aider à la réduire. Comme la qualité du sommeil, cette fatigue peut être à la fois cause et effet du stress ou du mal-être. Une pause de l’activité professionnelle peut permettre de « remettre les compteurs à zéro ».
Le temps de récupération est un investissement extrêmement rentable s’il est pris à temps.
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